Au terme de son ascension au Mont Blanc, le célèbre Horace-Bénédict de Saussure prophétise en 1787 : “Un jour viendra où l’on creusera sous le Mont-Blanc une voie charretière et ces deux vallées, la Vallée de Chamonix et le Val d’Aoste, seront unies”.
La volonté de relier la France et l’Italie est présente depuis de nombreuses années. En 1857, Camille Cavour souhaite relier Turin et Chambéry, les deux capitales du royaume de Savoie. Le percement de la galerie ferroviaire du Fréjus est alors lancé et devient le premier axe souterrain de communication à travers les Alpes.
Une réussite qui nourrit le désir de relever de nouveaux défis techniques et d’entreprendre d’autres grands travaux semblables. Au cours du XIXe siècle, de nombreux projets de nature ferroviaires sont élaborés. Dès 1882, plusieurs chantiers sont achevés. Cette année-là , les premiers trains commencent à transiter dans des tunnels, notamment entre l’Italie et la Suisse.
C’est dans ce contexte propice qu’un ingénieur, Arnold Monod, expose son projet. En 1908, Monsieur Monod évoque le percement du tunnel du Mont Blanc devant une délégation de parlementaires italiens et français, soutenus par les Premiers ministres Giolitti et Clémenceau en visite à Aoste.
L’info en plus :
A ce moment, le projet d’Arnold Monod est la première étude technique et géologique approfondie. Elle sera fondatrice des projets ultérieurs.
Cependant le projet d’Arnold Monod sera mis au second plan durant quelques annĂ©es. Les raisons ? Un bouleversement des scènes politiques française et italienne et le conflit mondial imminent. Aussi, sur un plan Ă©conomique, les tunnels du FrĂ©jus, du Saint-Gothard et du Simplon ne justifiaient plus la construction d’un ouvrage supplĂ©mentaire sous le Mont-Blanc.
26 ans plus tard, en 1934, Arnold Monod remet le percement du Tunnel du Mont-Blanc sous le feu des projecteurs. Il expose alors un nouveau projet : une galerie routière de 12,620 km, à double tube et avec séparation physique des sens de circulation, réservée aux véhicules avec moteur à combustion.
Ce projet est de nouveau étouffé par un climat politique houleux entre la France et l’Italie.
À titre individuel et à ses frais, le comte Dino Lora Totino relance le projet en 1946. Il commence à percer le tunnel côté italien, mais il est contraint, seulement un an après le début des travaux, d’interrompre ses activités sur ordre des autorités politiques et militaires italiennes.
L’info en plus :
Le comte avait déjà creusé 260 mètres.
MalgrĂ© l’arrĂŞt de ses travaux, cette initiative privĂ©e remet Ă l’ordre du jour la question du percement d’un tunnel sous le Mont Blanc.
Ce n’est qu’en 1949 qu’une convention franco-italienne est signée pour permettre le percement d’un tunnel routier sous le Mont Blanc.
Une construction dantesque débute en 1959 pour ouvrir une route sous le plus haut sommet d’Europe. Les travaux démarrent le 12 janvier 1959 versant italien et le 1er juin de la même année côté français. Les travaux dans la galerie sont réalisés de jour comme de nuit. Des trains électriques emmènent les ouvriers français et italiens. Petit à petit, les ouvriers gagnent du terrain sur la montagne. En 1961, les travaux avancent de 7 à 8 mètres par jour sous 3 000 mètres de montagne.
Ces rapides avancées sont rendues possible grâce au jumbo.
Qu’est-ce que le jumbo ?
Le jumbo est une machine gigantesque ressemblant à un échafaudage mobile sur rails. Pesant 100 tonnes et portant 16 perforatrices réparties sur 4 étages, les forets permettent de creuser de nombreux trous, environ 150, sur 4 mètres. Ces trous sont ensuite bourrés d’explosifs.
Durant les travaux de construction, 23 hommes donnèrent leur vie, 14 ouvriers sur le chantier italien, 7 ouvriers sur celui français et 2 guides de montagne disparurent pour que naisse ce tunnel.
Le 14 aoĂ»t 1962, une dernière charge de dynamite est allumĂ©e. La rencontre historique entre les ouvriers français et italiens se fait sur un Ă©boulis de roche. Tous les ouvriers sont fous de joie. Ils s’embrassent et Ă©changent leurs drapeaux respectifs. Les Ă©quipes du chantier poursuivent la fĂŞte dans les rues de Chamonix et de Courmayeur durant de nombreuses heures. Ils invitent mĂŞme la population Ă se joindre Ă eux.
Un véritable exploit a été réalisé par les équipes italiennes et françaises. En effet, il y avait un écart d’à peine 13 centimètres entre la galerie française et la galerie italienne.
L’info en plus :
A cette époque, le Tunnel du Mont Blanc devient le plus long tunnel du monde !
Le 15 septembre 1962, Georges Pompidou et Amintore Fanfani, respectivement les chefs des gouvernements français et italien, célèbrent officiellement la fin du percement.
Le Tunnel du Mont Blanc est alors reconnu comme étant une prouesse humaine et technique, mais également un symbole fort d’union entre les pays européens, entre les peuples et les territoires.
«Tunnel grandiose et symbolique, il est, bien sûr, une entreprise franco-italienne, mais demain Hollandais, Belges, Britanniques et d’autres encore l’emprunteront, démontrant que le désir de se connaître et de collaborer n’a jamais été aussi vif chez les peuples européens…», déclarait Georges Pompidou, lors de son discours inaugural.
Le 16 juillet 1965, Charles De Gaulle et Giuseppe Saragat inaugurent le tunnel en grande pompe 6 ans après le début des travaux. Il ouvrira au trafic quelques jours plus tard.
Le Tunnel du Mont Blanc constitua alors un axe fondamental de la fraternité retrouvée entre les peuples européens. Envie de traverser cet ouvrage qui a été rêvé depuis des siècles, imaginé par des visionnaires, soutenu par des gouvernements audacieux et créé par des hommes courageux ? Pour vous rendre au Tunnel du Mont Blanc, empruntez la RN205 à la sortie de l’A40 en direction de Chamonix. Avant votre sortie, n’oubliez pas de consulter l’info trafic.
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